Le petit pont de bois
Yves Duteil
ans le grand parnasse de la chanson française, il y a les ménestrels. Ces chanteurs au look androgyne et à l’allure de d’infatigables bergers de montagne qui semblent tout droit sortis d’un livre du moyen âge ! Je ne me moque pas !! au contraire ! Ces styles particuliers, mêlant à la fois tendresse et rudesse sauvage qui caractérise un Brassens, un Caradec, ou un Cabrel quoique surprenant au début, ont fini par conquérir la France et même le monde entier. Yves Duteil fait partie des chanteurs d’une autre génération ; celle d’avant les rythmes saccadés de Bim Bam toi de Carla. A l’époque, on se méfiait encore du rock, et on n’avait pas encore tout à fait vendu nos corps aux jeans tee-shirt et à la tonte du coiffeur. C’était Le temps des cheveux longs, des pantalons à pattes d’éléphants (patte deph) et de ces silhouettes filiformes qui nous font douter du réglage de notre télé. Avec leurs look androgynes garçon au féminin et fille au masculin comme dirait Nicolas Sirkis (chanteur du groupe Indochine), ils étaient fringués comme des bergers poètes et nous emmenaient en ballade un soir à la campagne, avec la lune pour seul lampe torche ! Eh bien figurez-vous que M. Duteil n’a pas vraiment changé ! Il boude toujours lorsqu’on lui parle de son look et de son statut de barde. Bien sûr avec l’âge, il a coupé ses cheveux devenus poivre et sel (ça fait moins désordre, surtout dans une mairie !) mais il est resté svelte et a gardé un style vestimentaire simple et épuré. Comme quoi la vie dans une petite ville campagnarde de 500 habitants, loin des turbulences médiatiques, et bien ça préserve ! Bien sûr il a enrichi son répertoire (faut bien naviguer avec son temps !), mais franchement, avec les références musicales cultivées tout au long de sa jeunesse( Les beatles, Polnareff, Chicago transit, Dylan Blood sweat and tears, la musique brésilienne...), il n’y avait vraiment pas de quoi s’inquiéter sur sa capacité à s’adapter aux beats nouveaux. En plus il s’est émancipé de tout ! Il a créé en 1981 sa propre maison d’édition de disques ( les Editions de l'Ecritoires). Il vit donc sa musique, la musique, comme ça lui plait ! Savez-vous combien d’écoles qui portent son nom ?! 12 Avouez que c’est carrément super pour un homme non décédé ! Et je souhaite personnellement qu’il reste parmi nous le plus longtemps possible ! Cela vous donnera l’occasion d’aller le voir sur scène ou de l’écouter en stream ou autres ! eh oui M. Yves Duteil revient à la chanson ! Il n’a pas désiré se représenter comme candidat maire se sa ville de Précy-sur-Marne !! Eh oui les chanteurs engagés dans les combats de la vie de tous les jours, cela existe et heureusement ! Parce qu’ils sont aussi des hommes et des citoyens comme nous, avec des idées et le désir de mettre la main à la patte (comme il le dit lui-même) ! ! Respect. De retour dans ses baskets de chanteur, il nous a donc concocté un nouvel album Alors si vous êtes emballés par le petit pont de bois !
Yves Duteil est né à Neuilly le 24 juillet 1949. Il compte dans sa lignée un fameux capitaine Dreyfus, oui celui de la triste affaire ! Il est le 3ème et dernier enfant d’une famille de bijoutier (pas étonnant qu’il ait enchainé les prix dans sa carrière !). Mais cela Papa Duteil austère et peu communicatif ne le sait pas encore. Il songe à une carrière de commercial pour son fils. Mais Yves est devenu un amoureux des mots, grâce auxquels il peut exprimer sa sensibilité et satisfaire son désir de communiquer. La musique arrive très tôt dans sa vie avec un piano (il a dix ans quand il apprend à en jouer) mais la guitare va être une véritable révélation. En 1966, à 17 ans au lycée Balzac, il crée son 1er groupe : les marquis five, tout en travaillant des chansons persos. Il a déjà trouvé sa vocation. Pour lui assurer un « vrai métier » dans la vie, son père désapprouvant la voie suivie, prend la décision de le retirer du lycée et le place dans un cours privé. Yves est alors obligé de louvoyer pour continuer à faire de la musique. Il trouve son salut dans les évènements de mai 1968. Eh oui ! Son père préfère l’éloigner de l’atmosphère délétère de la capitale, et sans doute de tous les "revendicards" ! C’est ainsi qu’il va devenir l’accompagnateur d’excursion, dans un club Med. Du vrai pain béni ! La vie au club lui donne la possibilité de faire quelques spectacles et de découvrir les facettes de la vie d’artiste. Rentré à Paris, il persiste dans cette voie qui est pour lui désormais son choix de vie. Il se produit dans quelques cabarets connus et un soir il rencontre Fréderic Botton auteur compositeur et producteur qui lui produit son premier 45 tour « virages ». Le succès n’est pas au rendez-vous, mais Yves s’accroche et vit de première partie de spectacle ; à l’ombre des grands, mais au grand soleil de l’amour puisqu’il a rencontré Noelle, la femme de sa vie ! En 1972 Yves sort son second album « j’attends », c’est pour lui à l’époque, la dernière bouteille jetée à la mer ; l’ultime tentative. Il songe à tout laisser tomber ! Eh bien ce ne sera pas pour cette fois ! L’album obtient le prix jeune chanson décerné par le haut comité de la langue française. Et lui apporte de nouveaux admirateurs hauts placés. Gérard Violette qui dirige alors le théâtre de la Ville lui propose alors de concevoir un spectacle avec lui et un quatuor en tête d’affiche. Yves accepte et conçoit en même temps un 3ème album qui sortira à la même date que le spectacle. Il se lance dans son écriture comme un enragé, et c’est ainsi que l’album Tarentelle sort en 1977. La suite ? Plus 1 300 000 exemplaires écoulés !!! C’est magique hein……… !!! Yves Duteil fait partie de ces chanteurs qui manie la langue française avec perfection, avec précision et qui comme une dentellière crochète avec finesse des textes qui sont devenus des incontournable de la langue française. Des pièces de musée, des références littéraires. Des bijoux qui s’exhibent bien en bouche. ( Ouf, là , je me rattrape bien ! ) Mais si, ça fait classe de chanter du Duteil ! Non ce n’est pas poussiéreux, non ce n’est pas mièvre ! C’est simple, c’est tendre ; ce sont des chansons qui racontent des petites histoires. Comme des descriptions de paysage, ou des descriptions de la vie et du bonheur vrai ou idéal ! La fierté d’avoir réparé un petit pont à la campagne ! (Tout à fait dans l’air du fait maison) Prendre un enfant par la main ?! (Mille petites façons de dire « je t’aime » à un enfant !) Qu’est-ce que cela fait d’être prisonnier ?! ( allez Yves, t’es le premier à nous chanter la perte de liberté, le confinement) ! Savez-vous danser la tarentelle ? ( la recette d’une danse en chanson , c’est super non ?) Et c’est raconté avec simplicité, douceur, avec respect et avec beaucoup d’humour quand cela s’y prête ! Ce qu’il y a de psychédéliques dans sa musique c’est qu’à chaque fois on se sent partir en voyage avec lui, sur la route ou en esprit. Cela sent bon la colonie ou les camps de vacances !. Difficile de ne pas reprendre en chœur ou de ne pas battre la cadence ! Les airs sont harmonieux et faciles à retenir ! ( Il avoue lui-même faire des entorses rythmiques, n’étant pas super à l’aise avec le solfège ; ça donne de l’espoir !). Alors forcément on comprend qu’il soit rapidement devenu un des chouchous du public !! Et fait rarissime il a aussi été adoubé par des institutions académiques qui ont craqué pour ses chansons et…… ses mélodies !! Yves Duteil revendique cette douceur qui fait partie de sa griffe musicale. Elle s’est révélée au fil du temps comme une force de frappe efficace. Selon lui, dixit : « La douceur n’est pas une faiblesse, c’est une force intime qui nous donne de l’énergie pour affronter l’adversité d’où qu’elle vienne » L’idée est simple, faire bouger les lignes tranquillement, calmement comme…l’eau des rivières !! Monsieur Yves (attention, c’est un grand !) aime chanter son vécu. C’est du moins ce qu’il affirme, mais je l’ai pris en flagrant délit. Il a confessé une idéalisation de la vie avec son père dans sa chanson la tendre image du bonheur. Il avoue avoir un peu enjolivé la communication affective avec ses parents dans son enfance. Comme on a tous tendance à faire pareil; t’es excusé Yves ! Mais la question se pose forcément ! Monsieur Yves a-t-il ou non reconstruit ce fameux pont ? A-t-il vraiment scié, coupé du bois et joué du marteau ? J’ai cherché la réponse, et le fin mot de l’histoire, vous ne l’aurez pas ici. Elle se trouve, pour ceux qui ont vraiment la volonté féroce de savoir (du genre, sans cette info j’dormirai pas de la nuit ! dans le livre : les mots qu’on a pas dits ( Ed. Nathan 1987). Il paraitrait qu’il y dévoile la genèse de certaines chansons. Triste, triste pour nous, c’est comme cela, je n’ai pas le carnet d’adresse de Manoukian ! Allons boudez-pas ! Il nous reste la chanson, et on peut toujours ouvrir les paris sur la question !! Peut-être qu’un jour, Monsieur Yves ou M. Manoukian nous donnerons la réponse (l’espoir fait vivre !)
En attendant, entrons dans une petite histoire qui commence par les paroles suivantes : Tu te souviens du pont qu’on traversait naguère. Une invitation à replonger dans le passé ; défilé de souvenirs et …….et d’émotions ! Peut-être que Monsieur Duteil n’a pas reconstruit ce pont là (je parle de celui de sa chanson). Mais il en a construit de plus précieux à mes yeux. Des ponts qui relient les êtres. Ceux qui invitent en les traversant à aller plus loin que se saluer de part et d’autre d’une rive pour partir à de la découverte de l’autre. Des ponts qui le temps d’une chanson nous ramène nos souvenirs. ( comme la madeleine de de Proust) Des ponts abstraits sorties de notre imaginaire qui offrent le passage à nos pas hésitants vers une nouvelle vie. Plus que des morceaux de bois, plus que des piquets résistants, ils représentent notre désir de communiquer, de savoir ; l’élan naturel de notre curiosité confronté à la distance et à l’impossible. Et franchement, réparés ou pas, ils restent des mystères d’élégances architecturales, défiant les lois de la physique. Qu’ils soient en bois, en pierre ou en acier, ce sont des portes d’entrées sur d’autres rives…. sur d’autres mondes.
Allez, écoutons vite monsieur Yves !
Et si vous voulez écouter la version d'archive et voir M.DUTEIL tout jeune et tout fringant ( Ah Ah !!) Cliquez Ici Le petit pont de bois
Dilili li dam !........ dam ! ....... dam !
Yes, Monsieur Duteil, you are the greatest !!!
Ses plus beaux bijoux : 1977 : L’album la tarentelle qui regorge de tubes 1985 : l'album la langue de chez nous comportant la chanson la langue de chez nous ; un succès phénoménal au Québec! Cette chanson est incontournable lors des baptêmes et des fêtes d'adoption. 1997 : L'album Touché 2018 :L'album Respect Récompenses: 1988 : Chevalier des Arts et Lettres Elu maire de 1989 à 2014 à la ville de Précy-sur-Marne Ce que l’on doit à M. Duteil : (En tant que chargé de mission en 1996 auprès du ministre de la Culture M. Douste-Blazy) Et un livre très écologique !! Fondation de l’APRES ( assistance aux populations et réhabilitation des espaces sinistrés) qui intervient surtout en Inde. Des livres , des livres( M. Yves aime écrire !!!) Il a écrit : Ma France buissonnière (1998 Ed. La Martinière), des livres pour enfants ( et pour grands!), et tout dernièrement son autobiographie (2021) Chemins de liberté qui accompagne un album du même nom. Notes et sources RDV à www.yvesduteil.com
A bientôt !!!
Posté le 08/05/2021
|